1h53 du matin, réveil brutal, panique : notre van se balance extrêmement fort. Vite, trouver la cause pour réagir de manière adéquate.
Théorie n°1 : Le frein à main mal serré, nous dévalons la petite pente qui nous sépare de la mer. Mais depuis nos fenêtres, le paysage ne bouge pas.
Théorie n°2 : Des gamins jouent à agiter notre camion pour s’amuser. Au milieu de la nuit dans un petit camping sombre et isolé ? non.
Théorie n°3 : Le vent. Oui, une tempête doit se lever…
Rassurés par cette dernière hypothèse et par la diminution des secousses, nous nous rendormons… Mais reste un doute : un vent violent sans aucun bruit ? A moins que… Un tremblement de terre !
2h36,de nouveau réveillés en sursaut, on frappe violemment au carreau.
Le ranger du camping nous demande de remonter immédiatement notre van, car après le séisme, une alerte au tsunami lui a été communiquée par les autorités : nous devons nous éloigner de l’eau de toute urgence.
Lundi 14 novembre 2016 : nous apprenons au matin que nous venons de vivre un puissant séisme de magnitude 7.8, dont l’épicentre était situé à 200km de nous.
Voilà de quoi introduire mon article sur Christchurch.
Car s’il y a bien une chose que nous savions avant de visiter la plus grande ville de l’île du Sud, de son nom maorie Ōtautahi, c’est bien qu’elle a subit de plein fouet le tremblement de terre meurtrier du 22 février 2011. Cette catastrophe coûtera la vie à 185 personnes.
Seulement nous ne pensions pas en voir encore les stigmates cinq ans plus tard : des ouvriers, des échafaudages, des zones entièrement rasées ou des bâtiments brisés et à l’abandon composent ce décor urbain. Après avoir vécu notre petite expérience sismique, nous frissonnions à imaginer la puissance du tremblement.
Pourtant, ce qui nous a peut-être le plus marqué en visitant Christchurch, c’est la joie qui se dégage de ses rues : de nombreuses oeuvres d’art l’habillent, comme si, près de chaque cicatrice, la couleur venait panser la plaie encore vive.
Afin de continuer de croire et de prier, une cathédrale « de transition » a été inventée par l’architecte japonais Shigeru Ban. Si elle est appelée ici The Cardboard Cathedral (la cathédrale de carton), c’est car sa structure est en tubes de carton.
Face à cette église provisoire se trouvait le bâtiment de la Canterbury Television (CTV) qui s’est écroulé pendant le tremblement de terre. Sur ce nouveau terrain vague, 185 chaises blanches. 185 chaises vides pour représenter l’absence de chacune des victimes. Un mémorial sobre et poignant.
Un petit panneau invite à choisir une chaise et à y rester aussi longtemps que souhaité. J’entame la discussion avec un homme qui passe la tondeuse entre les allées de cette oeuvre fantomatique.
– « Vous êtes volontaire ? » lui dis-je
– « Disons plutôt que c’est à moi d’en prendre soin, c’est moi qui l’ai créé… »
Plus loin, l’ancien centre commercial, entièrement démoli en 2011, reprend vie sous la forme d’un multitude de containers. Et si on aurait pu s’attendre à une triste accumulation d’infrastructures provisoires, on y découvre un quartier moderne, fluo et branché.
Nous continuons notre déambulation dans cette ville naufragée, et à chaque fois que notre regard se pose sur une ruine, une oeuvre vient attirer notre attention, comme un joyeux clin d’oeil.
Bref, une visite qui laisse de quoi méditer…
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